mardi 20 juillet 2010

Pluie noire - Masuji Ibuse



Les lectures se suivent, mais ne se ressemblent pas !
Une couverture jolie et intrigante pour un livre... particulier. J'aurais bien du mal à qualifier Pluie Noire de roman. Il s'agit en réalité de plusieurs récits de japonais ayant été contaminés lors de l'explosion de la bombe atomique d'Hiroshima le 6 août 1945.

Le récit se situe 5 ans après l'explosion. Yasuko, pourtant jeune fille désirable, ne parvient pas à se marier. Le bruit court qu'elle a été exposée à la pluie noire radio-active qui a suivit l'explosion. Son oncle, Shigematsu, va tenter de prouver que sa nièce n'est pas atteinte et pour cela il va retranscrire le journal de la jeune fille et surtout son propre journal de sinistré. Ce récit sera parfois interrompue pour reprendre le temps réel et enrichi d'autres récits de sinistrés.

Cette façon de faire ainsi que la rigueur toute japonaise, nous offre un livre presque froid. J'ai été surprise de ce ton quasi journalistique, de cette description des faits, de cette presque absence de sentiment. J'ai parfois regretté de n'avoir pas pu ressentir la peur ou la douleur des japonais. Et puis, au fil de ma lecture, je me suis interrogée : aurais-je supportée des descriptions trop sentimentales ? Cette approche factuelle a le mérite d'être lisible, d'être supportable, peut-être ne l'aurait-elle pas été si les sentiments avaient été retranscris.

Loin d'un coup de coeur (je ne pense pas que l'on puisse parler de "coup de coeur" pour un tel livre), il s'agit d'une lecture ahurissante sur cette époque, sur ce carnage perpétré par l'armée américaine. Pas d'esprit de vengeance dans ce livre, juste les faits. Un récit des quelques jours qui ont suivi Hiroshima, le récit de gens touchés par la bombe, le récit de gens contaminés et ignorant parfois tout de leur état, ignorant même la particularité de cette bombe.

Les descriptions ne vous seront pas épargnées : celles des dégâts matériels, celles des morts, celles des malades et de leurs symptômes, celles de tout un peuple cherchant les siens dans les décombres.

La nourriture est omniprésente par sa rareté. La femme de Shigematsu, Shigeko, nous expliquera pendant quelques pages le régime alimentaire pendant la guerre. Des distributions alimentaires avaient lieu par quartier. Concernant Shigematsu et sa famille, ils faisaient partie d'un groupe de 11 familles comptant au total 32 personnes et recevaient :

"Un fromage de soja
Un petit poisson (sardine ou chinchard.)
Deux choux chinois.
Cinq ou six légumes (carotte, rave, poireau, gobo, épinards, courge ou concombre).
Quatre ou cinq petites aubergines.
Une moitié de potiron japonais nains."

Je rappelle que ces denrées étaient à partager pour 32 personnes !

Un des rares divertissement de la famille était le tabac. Ils avaient pu conserver quelques feuilles de tabac, qu'ils avaient découpé et roulé avec du papier d'un dictionnaire d'anglais. "On a fumé chez nous, pendant et jusqu'après la guerre, un dictionnaire de poche entier."

J'ai été ému par les femmes. Elles m'ont semblé très courageuses. Dédaignant les dangers, elles partaient, souvent à pied, parfois en train pour quelques kilomètres, à la recherche de leur mari sans avoir aucune indication sur leur état (mort ou malade) ni sur leur emplacement. Parcourant la ville d'Hiroshima et les alentours, elles s'épuisaient et s'intoxiquaient sans même le savoir.

Ce récit permet aussi d'avoir un aperçu du caractère très rigoureux des japonais. En effet, lorsque les secours arrivent dans Hiroshima, il s'agit bien souvent de petits groupe réquisitionné dans les villes alentours. Leurs objectifs est alors de retrouver et ramener "au pays" les personnes issues de leur ville. Aucune attention ne sera portée aux autres sinistrés. Ces groupes de secours parcourront les rues, appelant pour trouver des personnes de leur ville. Bien souvent, ils ont trouveront très peu et mourront peu de temps après, intoxiqués par les radiations.

Un récit qui s'encadre dans le challenge Coups de coeur des bloggeurs, mais comme je vous le disais, pour moi, il ne peut s'agir d'un coup de coeur. Mais c'est une lecture que j'ai su apprécier (ne pas hésiter à faire quelques poses... surtout pendant les descriptions "médicales")


Un premier récit lu aussi dans le cadre du Challenge In the mood for Japan.


Pour celles et ceux qui ne se sentent pas le courage de lire ce livre mais qui voudraient en apprendre un peu plus, je vous invite à lire le récit du docteur Shuntaro Hida.

Je laisse la parole à Shigematsu, le 14 août 1945, veille de la capitulation japonaise :

"Mais la liberté à présent est si solidement garrottée, qu'elle étoufferait sans laisser échapper une plainte, ni même un sentiment d'inquiétude : bel effet du régime."

15 commentaires:

Pimpi a dit…

Fiou, c'est trop triste pour moi, ça, tout à fait le genre de roman dont je me tiens à bonne distance, en règle générale... la bêtise humaine, je ne peux rarement la lire en roman, c'est trop dur!
je t'admire d'avoir lu un tel roman!

Sandy a dit…

Un sujet difficile par le constat qui est fait mais ce qui est "agréable" c'est qu'il n'y a aucun jugement porté, pas de sentiment de vengeance, de colère...

Clarabel a dit…

Comme Pimpi, je t'admire d'avoir lu un tel roman.
Surtout en cette période, l'été, les vacances (pour moâ), la douceur, la chaleur, la nonchalance ... Mon programme de lecture se calque sur la saison, donc pas de récit trop dur ou douloureux à ingurgiter. No way !

Pickwick a dit…

Malgré la distance - ou peut-etre à cause d'elle ! - je suis assez tentée. Il faudra quand meme que je pense à prévoir des lectures détentes autour de celle-ci pour ne pas trop me plomber !

Sandy a dit…

@ Clarabel : Finalement je n'ai pas de "saison lecture" ! J'aime autant lire du sérieux en été, que du léger en hiver ! En revanche j'ai besoin d'alterner les genres... c'est parfois un peu "cascadeur" mais en général ça passe ! ;o)

@ Pickwick : Il faut s'habituer à cette distance... il m'a fallu une bonne cinquantaine de pages pour m'y faire, j'ai failli laissé tomber... mais je ne regrette pas d'avoir continué. Ne pas hésiter à faire des poses et repartir sur du plus léger ! ;o)

Cécile a dit…

HS : Tu me mettras dans les divers dis?! :) (en mode Yeux doux).

Sandy a dit…

Petite gourmande !! ;o)

Anonyme a dit…

Ce que tu dis de ce "roman" me fait un peu penser au recueil de nouvelles "Après le tremblement de terre" de Murakami Haruki... mais je crois que je vais passer mon tour ! :)

Lily a dit…

Yeahhh
Hâte de savoir ce projet !!! =)
N'oublies pas que tu fais aussi partie des tentatrices ;D

Sandy a dit…

@ Georges : ha tiens, je ne connais pas ce recueil... je note ! Le tremblement de terre est encore un autre sujet digne d'intérêt !

@ Lily : en fait mon idée s'étoffe encore et devrait me prendre plus de temps que prévu... j'attends d'avancer encore avant de vous en parler ! *au cas où je laisse tombé !*

Clarabel, maman poule a dit…

Bon allez, pour le poste, on va essayer d'oublier et de passer à autre chose. Tu reviendras te consoler parmi nous, mais ne reste pas trop longtemps dans tes wc ! ;o)
Bises de soutien !!!

Sandy a dit…

Merci merci merciiii !
En même temps sont jolies mes toilettes... la cuvette est couleur framboise ! ;o)

Lily a dit…

Oh dsl pour le poste !
Ils ne savent pas ce qu'ils perdent !
La baignoire c'est qd même plus pratique ;D

Sandy a dit…

Merci Lily ! D'une certaine manière, je me dis que de toute façon, je n'étais vraiment pas sur que ça me plaise... mais c'était surtout une façon de quitter mon poste actuel...
La baignoire c'est une bonne idée, je note ! Sauf que ce soir, mon homme s'est endormi plus d'une heure dedans ! ;o)

Unknown a dit…

Quelqu'un pourrait me donner le résumer complet de ce roman la pluie noire
s'il vous plaît c'est URGENT